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Avant qu’il ne tue
Blake Pierce


Un mystГЁre Mackenzie White #1
Une nouvelle série mystère qui vous tiendra en haleine par l’auteur bestseller Blake Pierce. Une femme est retrouvée assassinée dans un champ de maïs du Nebraska, attachée à un poteau, victime d’un tueur cinglé. Il ne faut pas longtemps à la police pour se rendre compte qu’ils ont affaire à un tueur en série et que sa folie meurtrière ne fait que commencer. La détective Mackenzie White, jeune, coriace et plus futée que la plupart de ses collègues machos et vieillissants, est appelée à contrecœur sur l’affaire. Bien que les autres officiers ne veuillent pas l’admettre, ils ont besoin de son esprit jeune et brillant qui avait déjà permis de résoudre des affaires qui les avaient laissés perplexes. Cependant, même pour Mackenzie, cette enquête se révèle être une énigme impossible à résoudre, quelque chose que ni elle ni ses collègues n’avaient jamais vu auparavant. Le FBI est appelé en renfort et une intense chasse à l’homme s’ensuit. Mackenzie, sous le choc de son propre passé obscur, de ses relations amoureuses ratées et de son attirance indéniable pour le nouvel agent du FBI, se retrouve à lutter contre ses propres démons quand sa poursuite du tueur l’emmène jusqu’aux recoins les plus sombres de son esprit. Alors qu’elle se plonge dans l’esprit du tueur, obsédée par sa psychologie de tordu, elle découvre que le mal existe vraiment. Alors que toute sa vie s’écroule autour d’elle, elle espère juste pouvoir s’en extirper à temps. Alors que les cadavres continuent à apparaître et qu’une course effrénée contre le temps s’ensuit, il n’y a pas d’autre issue que de trouver ce monstre avant qu’il ne tue à nouveau. Un thriller psychologique sombre avec un suspense qui vous tiendra en haleine, AVANT QU’IL NE TUE marque le début d’une fascinante nouvelle série, et d’un nouveau personnage, qui vous fera tourner les pages jusqu’à des heures tardives de la nuit. Le volume 2 de la série mystère Mackenzie White sera bientôt disponible.







AVANT QU’IL NE TUE



(UN MYSTÈRE MACKENZIE WHITE – VOLUME 1)



B L A K E P I E R C E


Blake Pierce



Blake Pierce est l’auteur de la populaire série de thrillers RILEY PAIGE : SANS LAISSER DE TRACES (tome 1), REACTION EN CHAINE (tome 2), LA QUEUE ENTRE LES JAMBES (tome 3) et LES PENDULES A L’HEURE (tome 4). Elle écrit également les séries de thrillers MACKENZIE WHITE et AVERY BLACK.

Fan depuis toujours de polars et de thrillers, Blake adore recevoir de vos nouvelles. N'hГ©sitez pas Г  visiter son site web www.blakepierceauthor.com (http://www.blakepierceauthor.com) pour en savoir plus et rester en contact !



Copyright В© 2016 par Blake Pierce. Tous droits rГ©servГ©s. Sous rГ©serve de la loi amГ©ricaine sur les droits d'auteur de 1976, aucune partie de cette publication ne peut ГЄtre reproduite, distribuГ©e ou transmise sous quelque forme ou par quelque procГ©dГ© que ce soit, ni enregistrГ©e dans une base de donnГ©es ou un systГЁme de rГ©cupГ©ration, sans l'accord prГ©alable de l'auteur. Ce livre Г©lectronique est sous licence pour usage personnel uniquement. Ce livre Г©lectronique ne peut ГЄtre ni revendu, ni donnГ© Г  d'autres personnes. Si vous dГ©sirez partager ce livre avec quelqu'un, veuillez acheter une copie supplГ©mentaire pour chaque bГ©nГ©ficiaire. Si vous lisez ce livre et que vous ne l'avez pas achetГ©, ou qu'il n'a pas Г©tГ© achetГ© pour votre usage personnel uniquement, veuillez le rendre et acheter votre propre copie. Merci de respecter le travail de cet auteur. Il s'agit d'une Е“uvre de fiction. Les noms, les personnages, les entreprises, les organisations, les endroits, les Г©vГ©nements et les incidents sont soit le produit de l'imagination de l'auteur, soit utilisГ©s de maniГЁre fictive. Toute ressemblance avec des personnes existantes ou ayant existГ© est purement fortuite. Image de couverture Copyright lassedesignen, utilisГ© sous licence de Shutterstock.com

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LIVRES PAR BLAKE PIERCE



LES ENQUГЉTES DE RILEY PAIGE

SANS LAISSER DE TRACES (Tome 1)

REACTION EN CHAINE (Tome 2)

LA QUEUE ENTRE LES JAMBES (Tome 3)

LES PENDULES À L’HEURE (Tome 4)



SÉRIE MYSTÈRE MACKENZIE WHITE

AVANT QU’IL NE TUE (Volume 1)


TABLE DES MATIГ€RES



PROLOGUE (#u0eeefea5-34a0-53e6-b5ee-caa66cfa1f6e)

CHAPITRE UN (#uc837f6b0-6e72-545c-a2a1-6e93881883b6)

CHAPITRE DEUX (#ufd917485-cdd0-5e4f-904f-6fdd956a8c4b)

CHAPITRE TROIS (#ufb4dd71f-84c3-54ed-a132-ca36d0594a5a)

CHAPITRE QUATRE (#uac7b0155-b622-50b6-96fc-f65cb95a6ec8)

CHAPITRE CINQ (#u2065b232-911e-5ecc-9af3-19d3afb81267)

CHAPITRE SIX (#u32cc838e-b6ee-502a-baec-709712aa6e1d)

CHAPITRE SEPT (#ub2fafc26-7132-5276-b9a9-94cba5b3cffa)

CHAPITRE HUIT (#litres_trial_promo)

CHAPITRE NEUF (#litres_trial_promo)

CHAPITRE DIX (#litres_trial_promo)

CHAPITRE ONZE (#litres_trial_promo)

CHAPITRE DOUZE (#litres_trial_promo)

CHAPITRE TREIZE (#litres_trial_promo)

CHAPITRE QUATORZE (#litres_trial_promo)

CHAPITRE QUINZE (#litres_trial_promo)

CHAPITRE SEIZE (#litres_trial_promo)

CHAPITRE DIX-SEPT (#litres_trial_promo)

CHAPITRE DIX-HUIT (#litres_trial_promo)

CHAPITRE DIX-NEUF (#litres_trial_promo)

CHAPITRE VINGT (#litres_trial_promo)

CHAPITRE VINGT ET UN (#litres_trial_promo)

CHAPITRE VINGT-DEUX (#litres_trial_promo)

CHAPITRE VINGT-TROIS (#litres_trial_promo)

CHAPITRE VINGT-QUATRE (#litres_trial_promo)

CHAPITRE VINGT-CINQ (#litres_trial_promo)

CHAPITRE VINGT-SIX (#litres_trial_promo)

CHAPITRE VINGT-SEPT (#litres_trial_promo)

CHAPITRE VINGT-HUIT (#litres_trial_promo)

CHAPITRE VINGT-NEUF (#litres_trial_promo)

CHAPITRE TRENTE (#litres_trial_promo)

CHAPITRE TRENTE ET UN (#litres_trial_promo)

CHAPITRE TRENTE-DEUX (#litres_trial_promo)

CHAPITRE TRENTE-TROIS (#litres_trial_promo)

CHAPITRE TRENTE-QUATRE (#litres_trial_promo)

CHAPITRE TRENTE-CINQ (#litres_trial_promo)

CHAPITRE TRENTE-SIX (#litres_trial_promo)




PROLOGUE


Dans une toute autre situation, les reflets des premières lueurs de l’aube sur les champs de maïs lui auraient paru un spectacle magnifique. Elle regarda la lumière de ce début de journée effleurer les épis de sa jolie couleur dorée et elle s’efforça d’y trouver une certaine beauté.

Elle avait besoin de se distraire sinon la douleur serait vraiment insupportable.

Elle était attachée à un poteau en bois qui montait le long de son échine et s’arrêtait à 60cm au-dessus de sa tête. Elle avait les mains liées derrière le dos et attachées au poteau. Elle ne portait qu’un string en dentelle noire et un soutien-gorge qui mettait en valeur sa poitrine généreuse. C’était le soutien-gorge qui lui amenait le plus de pourboires au club de strip-tease, le soutien-gorge qui donnait l’illusion que sa poitrine appartenait à une fille de vingt et un ans et non pas à une femme de trente-quatre ans, mère de deux enfants.

Le poteau lui râpait la peau du dos jusqu’au sang. Mais cette douleur était loin d’être aussi intense que celle que lui avait infligée l’homme à la voix grave et effrayante.

Tout son corps se tendit lorsqu’elle l’entendit arriver derrière elle, ses pas écrasant l’herbe de la clairière. Il y avait aussi un autre son, plus sourd. Il traînait quelque chose derrière lui. Elle réalisa qu’il s’agissait du fouet qu’il avait utilisé pour la battre. Il était barbelé et le bout se terminait en éventail. Elle ne l’avait aperçu qu’une seule fois et ça lui avait suffi.

Des dizaines de coups de fouet lui avaient lacéré le dos et le bruit seul de cette chose traînée au sol la faisait paniquer. Elle cria, probablement pour la centième fois cette nuit, mais son cri sembla se perdre et s’éteindre dans le champ de maïs. Au début, elle criait à l’aide, espérant que quelqu’un pourrait l’entendre. Mais au fil des heures, ses cris étaient devenus une sorte de râles d’angoisse, les cris de quelqu’un qui sait que personne ne viendra l’aider.

« J’envisage de te laisser partir » dit l’homme.

Il avait la voix d’un fumeur ou de quelqu’un qui avait beaucoup hurlé. Une sorte de zézaiement bizarre était attaché à ses mots.

« Mais d’abord, tu dois avouer tes crimes. »

Il avait déjà dit ça à quatre reprises. Elle se creusa de nouveau les méninges, se demandant à quoi il faisait référence. Elle n’avait aucun crime à avouer. Elle avait toujours été quelqu’un de bien, traitant correctement les gens qu’elle connaissait et elle avait essayé d’être une bonne mère même si elle aurait aimé faire mieux.

Qu’est-ce qu’il voulait d’elle ?

Elle cria Г  nouveau et courba le dos contre le poteau. Elle sentit alors un lГ©ger relГўchement des liens autour de ses poignets. Elle sentit Г©galement le sang collГ© autour de la corde.

В« Avoue tes crimes В» rГ©pГ©ta-t-il.

В« Je ne sais pas de quoi vous parlez ! В» gГ©mit-elle.

В« Tu vas te rappeler В» dit-il.

Il avait déjà dit ça auparavant. Et c’était juste avant chaque…

Il y eut un léger bruit au moment où le fouet décrivit un arc dans l’air.

Elle hurla et se tordit de douleur contre le poteau lorsque la chose l’atteignit.

Du sang neuf jaillit de sa blessure mais elle le sentit à peine. Toute son attention était concentrée sur ses poignets. Le sang accumulé à cet endroit durant les dernières heures s’était mélangé à sa sueur. Elle sentit un vide entre la corde et ses poignets et elle pensa qu’elle pourrait peut-être parvenir à s’échapper. Son esprit tentait de prendre le large afin de s’éloigner de la situation.

Clac !

Le coup l’atteignit directement à l’épaule et elle hurla.

« S’il vous plait » dit-elle. « Je ferai tout ce que vous voulez mais laissez-moi partir ! »

« Avoue tes… »

Elle tira de toutes ses forces et parvint à ramener ses bras vers l’avant. Ses épaules étaient extrêmement douloureuses mais elle fut instantanément libérée de ses liens. Elle sentit une légère brûlure au moment où la corde lui effleura le haut de la main mais ça n’avait rien à voir avec la douleur intense qui lui lacérait le dos.

Elle se jeta en avant si rapidement qu’elle tomba presque à genoux, risquant de gâcher sa fuite. Mais l’instinct primitif de survie prit le dessus et le contrôle de ses muscles et avant même de réaliser ce qu’elle faisait, elle était déjà occupée à courir.

Elle se mit à courir très vite, stupéfaite d’être parvenue à se libérer et étonnée que ses jambes la portent après avoir été attachée pendant aussi longtemps. Mais elle courut sans s’arrêter pour y penser.

Elle traversa le champ de maïs en courant, les épis lui fouettant le corps au passage. Les feuilles et les branches lui caressaient le corps, effleurant son dos lacéré comme de vieux doigts flétris. Elle cherchait son souffle et se concentra sur le fait de continuer à mettre un pied devant l’autre. Elle savait que l’autoroute se trouvait à proximité. Tout ce qu’elle avait à faire, c’était de continuer à courir et d’ignorer la douleur.

Derrière elle, l’homme se mit à rire, d’un rire qui ressemblait à celui d’un monstre caché depuis des siècles dans le champ de maïs.

Elle gémit et continua à courir, ses pieds nus martelant le sol et son corps presque dénudé fouetté par les épis de maïs. Sa poitrine rebondissait de façon ridicule et son sein gauche était sorti de son soutien-gorge. Elle se promit à elle-même que si elle s’en sortait vivante, elle ne ferait plus jamais de strip-tease. Elle trouverait un autre boulot et une façon plus digne de subvenir aux besoins de ses enfants.

Cette pensée la motiva et elle se mit à courir encore plus vite à travers les épis de maïs. Elle courut aussi vite qu’elle le put. Elle serait libre si elle continuait à courir. L’autoroute ne devait pas être très loin, n’est-ce pas ?

Peut-être. Mais même si c’était le cas, elle n’avait aucune certitude d’y rencontrer quelqu’un. Il n’était même pas six heures du matin et les autoroutes du Nebraska étaient bien souvent désertes à cette heure-ci.

Devant elle, se profila une ouverture dans le champ. La lumière de l’aube l’atteignit et son coeur bondit à l’idée d’apercevoir l’autoroute.

Elle traversa l’ouverture et elle entendit incrédule le bruit d’un moteur qui s’approchait. Elle fut soudainement remplie d’espoir.

Elle vit la lueur de phares s’approchant et elle courut encore plus vite, Elle était si proche qu’elle pouvait sentir le bitume imprégné de chaleur.

Elle atteignit l’extrémité du champ de maïs au moment où un pickup rouge passait sur la route. Elle hurla et gesticula des bras frénétiquement.

« S’il vous plaît ! » hurla-t-elle.

Mais, horrifiГ©e, elle vit le pickup passer en vrombissant.

Elle gesticula des bras en pleurnichant. Peut-être que le chauffeur allait jeter un coup d’œil dans son rétroviseur…

Clac !

Une douleur fulgurante lui lacéra l’arrière du genou gauche et elle tomba à terre.

Elle hurla et tenta de se remettre debout mais elle sentit une main robuste l’attraper par les cheveux et la traîner de nouveau vers le champ de maïs.

Elle tenta de bouger, de se libérer mais cette fois-ci, elle n’y parvint pas.

Un dernier claquement de fouet se fit entendre avant qu’elle ne perde finalement conscience.

Elle savait que tout se terminerait très bientôt : le bruit, le fouet, la douleur et sa courte vie jalonnée d’épreuves.




CHAPITRE UN


La détective Mackenzie White se préparait au pire en traversant le champ de maïs cet après-midi-là. Le bruit des épis la perturbait alors qu’elle s’y frayait un passage. C’était un bruit sourd effleurant sa veste à mesure qu’elle passait d’une rangée à l’autre. La clairière qu’elle cherchait à atteindre lui semblait à des kilomètres de distance.

Elle finit par y arriver et s’arrêta net à ce qu’elle y vit, souhaitant être n’importe où ailleurs à ce moment-là. Il y avait un cadavre presque nu d’une femme d’une trentaine d’années, attaché à un poteau, le visage figé dans une expression de profonde angoisse. C’était une expression que Mackenzie aurait souhaité n’avoir jamais vue et qu’elle savait qu’elle n’oublierait jamais.

Cinq policiers s’affairaient dans la clairière mais sans faire quoi que ce soit d’utile. Ils cherchaient à avoir l’air occupés mais elle savait qu’ils essayaient seulement de comprendre à quoi ça rimait. Elle était sûre qu’aucun d’entre eux n’avait jamais rien vu de pareil. Après avoir vu cette jeune femme blonde attachée à ce poteau en bois, Mackenzie sut tout de suite que quelque chose de bien plus important était en jeu. Quelque chose auquel elle n’avait jamais été confrontée. Ce n’était pas le genre de chose qui se passait dans les champs de maïs du Nebraska.

Mackenzie s’approcha du corps et en fit lentement le tour. Elle sentit les autres policiers l’observer. Elle savait que certains d’entre eux trouvaient qu’elle prenait son boulot bien trop au sérieux. Elle abordait les événements de très près, cherchait des liens et des connexions presqu’abstraites de par nature. Elle était cette jeune femme qui avait obtenu ce poste de détective bien trop rapidement aux yeux de beaucoup d’hommes du commissariat et elle en était bien consciente. Elle était cette fille ambitieuse dont tout le monde pensait qu’elle cherchait à atteindre une position bien plus importante que celle d’une détective de police dans une petite ville du Nebraska.

Mackenzie les ignora. Elle concentra son attention sur le cadavre, chassant les mouches qui tournaient autour du corps de la femme dans un petit nuage noir. Le cadavre avait souffert des effets de la chaleur. Il avait fait chaud tout l’été mais on aurait dit que toute cette chaleur s’était soudainement concentrée dans ce champ de maïs.

Mackenzie s’approcha du corps et l’étudia de près, essayant de réprimer un sentiment de nausée et de tristesse. Le dos de la femme était couvert d’entailles. Elles étaient uniformes, probablement provoquées par un seul instrument. Son dos était couvert de sang séché. L’arrière de son string en était imbibé.

Alors que Mackenzie terminait de faire le tour du cadavre, un policier de petite taille mais corpulent s’approcha d’elle. Elle le connaissait bien mais ne l’appréciait guère.

В« Salut, dГ©tective White В» dit le chef Nelson.

В« Chef В» rГ©pondit-elle.

В« OГ№ est Porter ? В»

Il n’y avait aucune condescendance dans sa voix mais elle la ressentit tout de même. Ce chef de police endurci d’une cinquantaine d’années n’avait aucune envie qu’une jeune femme de vingt-cinq ans travaille sur cette affaire. Walter Porter, son partenaire de cinquante-cinq ans, serait bien plus capable de s’occuper de ce boulot.

« Il est près de l’autoroute » répondit Mackenzie. « Il est occupé à parler avec le fermier qui a découvert le corps. Il ne va pas tarder à arriver. »

« OK » dit Nelson, visiblement plus à l’aise. « Qu’est-ce que tu en penses ? »

Mackenzie ne savait pas trop comment répondre à cette question. Elle savait qu’il la testait. Il le faisait de temps à autre, parfois même au sujet de simples détails au commissariat. Il ne le faisait avec aucun autre officier ou détective et elle était certaine qu’il le faisait avec elle uniquement parce qu’elle était jeune et que c’était une femme.

Son instinct lui disait qu’il ne s’agissait pas d’un simple meurtre. Peut-être était-ce dû aux très nombreuses entailles dans le dos ou le fait que cette femme avait tout l’air d’une pin-up. Il était évident qu’elle avait de faux seins et Mackenzie soupçonnait que d’autres parties de son corps avait également été « retouchées ». Elle portait une bonne couche de maquillage qui avait partiellement coulé sous l’effet des larmes.

« Je pense » dit Mackenzie, en réponse à la question de Nelson, « qu’il s’agit d’un meurtre purement violent. Je pense que la police scientifique ne trouvera aucune trace d’abus sexuel. La plupart des hommes qui kidnappent des femmes dans un but sexuel torturent rarement autant leur victime même s’ils envisagent de la tuer par la suite. Je pense également, à en juger par son style de sous-vêtements, qu’il s’agit d’une femme de nature provocatrice. Franchement, à en juger par son style de maquillage et la taille généreuse de sa poitrine, je commencerais par appeler les clubs de strip-tease à Omaha afin de savoir si une danseuse a été portée disparue hier soir. »

« On s’est déjà occupé de tout ça » répondit Nelson d’un ton suffisant. « La victime s’appelle Hailey Lizbrook, trente-quatre ans, mère de deux garçons et danseuse de niveau moyen au club The Runway à Omaha. »

Il répétait ces faits comme s’il lisait un mode d’emploi. Mackenzie supposa qu’il avait été assez longtemps à son poste pour cesser de considérer les victimes de meurtre comme des personnes, mais plutôt comme de simples puzzles à résoudre.

Mais Mackenzie, qui n’en était qu’à ses premières années de carrière, n’était pas aussi endurcie et sans coeur. Elle avait examiné la femme dans le but de découvrir ce qui s’était passé mais elle l’avait également vue comme une mère laissant deux petits garçons derrière elle et qui seraient orphelins le reste de leur vie. Pour qu’une mère de deux enfants soit strip-teaseuse, Mackenzie supposait qu’elle avait des soucis d’argent et qu’elle était prête à faire tout et n’importe quoi pour subvenir aux besoins de ses enfants. Et maintenant, elle était là, attachée à un poteau et partiellement mutilée par un homme inconnu qui…

Le bruissement des épis de maïs derrière elle l’interrompit dans ses réflexions. Elle se retourna et vit Walter Porter s’approchant à travers champ. Il avait l’air contrarié en atteignant la clairière, frottant sa veste pour en faire tomber la crasse et les filaments d’épis.

Il inspecta l’endroit des yeux durant un instant avant que son regard ne tombe sur le corps de Hailey Lizbrook attaché au poteau. Il eut un rictus de surprise, sa moustache grisonnante se relevant en angle droit. Puis il vit Mackenzie et Nelson et vint directement à leur rencontre.

В« Porter В» dit le chef Nelson. В« White a dГ©jГ  rГ©solu cette affaire. Elle est sacrГ©ment intelligente. В»

« Ça lui arrive » répondit Porter d’un ton dédaigneux.

C’était toujours comme ça. Nelson ne lui faisait pas vraiment un compliment. En fait, il taquinait Porter d’être coincé avec la jolie jeune fille surgie de nulle part qui avait obtenu le poste de détective, la jolie jeune fille que peu d’hommes au commissariat âgés de plus de trente ans prenaient au sérieux. Et ça énervait Porter.

Bien qu’elle apprécie réellement de voir Porter souffrir de la taquinerie, ça n’en valait pas la peine de se sentir sous-estimée. À maintes reprises, elle avait résolu des affaires que d’autres hommes n’avaient pas pu résoudre et elle savait qu’ils se sentaient menacés. Elle avait seulement vingt-cinq ans, bien trop jeune pour se sentir surmenée dans une carrière qu’elle avait adorée. Mais aujourd’hui, coincée avec Porter et dans ce commissariat, elle commençait à la détester.

Porter fit un effort pour se placer entre Nelson et Mackenzie, histoire de lui faire comprendre qu’il était maintenant aux commandes. Mackenzie sentit monter la colère en elle mais elle se contint. Cela faisait maintenant trois mois qu’elle se contenait, depuis le jour où on l’avait affectée à travailler avec lui. Depuis le premier jour, Porter n’avait pas caché l’aversion qu’il ressentait à son égard. Après tout, elle était venue remplacer le partenaire avec qui il travaillait depuis vingt-huit ans et qui avait été remercié des forces de police, du point de vue de Porter, pour faire de la place à une jeune femme.

Mackenzie ignora ce manque de respect flagrant car elle refusait que ça puisse avoir un impact sur son éthique professionnelle. Sans un mot, elle s’approcha à nouveau du corps. Elle l’observa attentivement. Elle souffrait pour cette femme mais en même temps, aucun cadavre ne pourrait jamais autant l’affecter que le premier corps qu’elle avait vu dans sa vie. Elle arrivait presque à ne plus voir le corps de son père lorsqu’elle arrivait sur une scène de crime, mais pas encore tout à fait. Elle avait sept ans lorsqu’elle était entrée dans la chambre où elle avait trouvé le corps de son père étendu sur un lit et baignant dans une mare de sang. Et elle n’avait jamais cessé de le voir depuis lors.

Mackenzie examina attentivement le corps, à la recherche d’indices démontrant que ce meurtre n’avait rien de sexuel. Elle ne vit aucun signe de bleus ni d’égratignures sur la poitrine ni sur les fesses, pas de saignement externe autour du vagin. Elle examina alors les mains et les pieds de la femme, se demandant s’il pouvait y avoir une motivation religieuse. Des signes de perforations au niveau des paumes, des chevilles et des pieds pourraient faire référence à la crucifixion. Mais là encore, elle ne trouva aucun signe de ce genre.

Dans le bref compte-rendu qu’elle et Porter avaient reçu, il était stipulé que les vêtements de la victime n’avaient pas été retrouvés. Mackenzie supposait donc que le tueur les avait gardés ou s’en était débarrassé. Cela lui faisait penser que le tueur était soit très prudent, soit d’une nature limite obsessive. Ajoutez à cela que ses actes de la nuit dernière n’avaient pas été motivés par des raisons sexuelles, et ça en faisait un tueur potentiellement insaisissables et très calculateur.

Mackenzie recula jusqu’à la limite de la clairière et observa la scène dans son entièreté. Porter la regarda du coin de l’œil puis l’ignora complètement pour continuer à parler avec Nelson. Elle remarqua que les autres policiers l’observaient. Au moins, certains d’entre eux la regardaient travailler. Elle était arrivée à ce poste de détective avec la réputation d’être exceptionnellement intelligente et très estimée par la majorité de ses instructeurs à l’école de police et de temps en temps, de jeunes policiers, hommes et femmes confondus, lui posaient des questions sincères ou lui demandaient son opinion.

D’un autre côté, elle savait aussi que certains des hommes présents la regardaient plutôt avec un œil lubrique. Elle ne savait pas vraiment ce qui était le pire : les hommes qui mataient ses fesses lorsqu’elle passait à proximité ou ceux qui riaient derrière son dos en se moquant de la petite fille jouant au détective.

Alors qu’elle examinait la scène, elle fut de nouveau assaillie par la conviction tenace que quelque chose ne tournait pas rond. Elle avait l’impression d’ouvrir un livre et de lire seulement la première page d’une histoire qui réservait encore de nombreux chapitres.

Ceci n’est qu’un début, pensa-t-elle.

Elle examina le sol autour du poteau et remarqua quelques marques laissées par des chaussures mais pas assez pour fournir des empreintes. Il y avait également toute une série de formes au sol qui ressemblaient à des serpentins. Elle s’agenouilla pour les observer de plus près et elle vit que bon nombre de ces formes étaient côte à côte, serpentant autour du poteau d’une manière saccadée, comme si l’objet qui les avait laissées avait fait plusieurs fois le tour du poteau. Elle examina de nouveau le dos de la victime et vit que les entailles dans la chair avaient la même forme que les marques au sol.

В« Porter В» dit-elle.

« Quoi encore ? » répondit Porter, visiblement ennuyé d’avoir été interrompu.

« Je pense avoir trouvé des traces laissées par l’arme. »

Porter hésita un instant, puis se dirigea vers l’endroit où Mackenzie était accroupie au sol. Lorsqu’il s’agenouilla, il grogna légèrement et elle entendit craquer sa ceinture. Il avait une vingtaine de kilos en trop et c’était d’autant plus visible qu’il s’approchait des cinquante-cinq ans.

В« Une sorte de fouet ? В» demanda-t-il.

В« On dirait. В»

Elle examina le sol, suivant les traces dans le sable jusqu’au poteau et c’est alors qu’elle remarqua autre chose. C’était quelque chose de minuscule, de si petit qu’elle faillit ne pas le remarquer.

Elle s’approcha du poteau en veillant bien à ne pas toucher le corps avant que ne soit arrivée la police scientifique. Elle s’accroupit à nouveau et sentit tout le poids de la chaleur de l’après-midi s’abattre sur ses épaules. Imperturbable, elle tendit le cou pour s’approcher au plus près du poteau. Elle en était tellement proche que son front le touchait presque.

« Qu’est-ce que tu fous ? » demanda Nelson.

В« Il y a quelque chose de gravГ© В» dit-elle. В« On dirait des chiffres. В»

Porter s’approcha à nouveau pour y jeter un coup d’oeil mais prit soin de ne plus s’agenouiller. « White, ce morceau de bois a facilement plus de vingt ans » dit-il. « Et cette gravure est probablement aussi vieille. »

« Peut-être » dit Mackenzie. Mais elle n’en était pas convaincue.

Se dГ©sintГ©ressant de la dГ©couverte, Porter retourna discuter avec Nelson, comparant des notes sur les informations obtenues du fermier qui avait dГ©couvert le corps.

Mackenzie sortit son téléphone et prit les chiffres en photo. Elle agrandit l’image et les chiffres apparurent sur l’écran. En les voyant clairement en détails, elle sentit à nouveau que tout ceci n’était que le début de quelque chose de bien plus important.



N511/J202



Les chiffres ne lui inspiraient rien de particulier. Peut-être que Porter avait raison et peut-être qu’ils ne signifiaient absolument rien. Peut-être qu’ils avaient été gravés là par un bûcheron lorsque le poteau avait été fabriqué. Ou peut-être que c’était des enfants qui les avaient gravés à une époque ou à une autre.

Mais il y avait quelque chose qui ne collait pas.

Il n’y avait rien qui collait en fait.

Et elle était persuadée, du fond du coeur, que tout ceci n’était qu’un début.




CHAPITRE DEUX


Mackenzie sentit son estomac se nouer lorsqu’elle vit à travers la vitre de la voiture toutes les camionnettes de journalistes amassées et les reporters s’efforçant d’avoir les meilleures places afin de les assaillir, elle et Porter, au moment où ils arriveraient au commissariat. Pendant que Porter se garait, elle vit comment de nombreux journalistes s’approchaient, traversant en courant la pelouse du commissariat avec leur caméraman à la suite.

Mackenzie vit également Nelson qui se tenait déjà devant les portes d’entrée et qui faisait tout son possible pour essayer de les calmer. Il avait l’air agité et embarrassé. De là où elle se trouvait, elle pouvait voir la sueur scintiller sur son front.

Au moment de sortir du véhicule, Porter se plaça à ses côtés afin de s’assurer qu’elle ne soit pas la première détective que les journalistes rencontrent. Alors qu’il la dépassait, il lui dit : « Ne raconte surtout rien à ces vampires. »

Elle sentit l’indignation monter en elle en entendant son commentaire condescendant.

В« Je sais, Porter. В»

La foule de journalistes et de caméras arrivèrent jusqu’à eux. Au moins une dizaine de micros étaient tendus vers leurs visages alors qu’ils essayaient de traverser la mêlée. Les questions jaillissaient dans tous les sens.

В« Est-ce que les enfants de la victime ont Г©tГ© informГ©s ? В»

« Quelle a été la réaction du fermier lorsqu’il a découvert le corps ? »

« Est-ce que c’est une affaire d’abus sexuel ? »

« Est-ce une bonne idée qu’une femme s’occupe d’une telle affaire ? »

Cette dernière question ennuya un peu Mackenzie. Bien sûr, elle savait qu’ils cherchaient uniquement à provoquer une réponse, espérant une annonce juteuse de vingt secondes pour le journal de l’après-midi. Il n’était que seize heures et s’ils agissaient rapidement, ils pourraient obtenir une info pour les actualités de dix-huit heures.

Alors qu’elle se frayait un passage à travers les portes et le hall d’entrée du commissariat, cette dernière question continuait à résonner dans sa tête.

Est-ce une bonne idée qu’une femme s’occupe d’une telle affaire ?

Elle se rappela la maniГЁre impassible avec laquelle Nelson lui avait communiquГ© les informations concernant Hailey Lizbrook.

Bien sûr que c’était une bonne idée, pensa Mackenzie. En fait, c’était même primordial.

Ils pénétrèrent finalement dans le commissariat de police et les portes se refermèrent derrière eux. Mackenzie se sentit soulagée d’être enfin au calme.

В« Saloperies de sangsues В» dit Porter.

Il avait abandonné sa démarche arrogante maintenant qu’il ne se trouvait plus face aux caméras. Il passa lentement devant la réception et se dirigea vers le hall qui menait aux salles de conférence et aux bureaux qui constituaient leur commissariat. Il avait l’air fatigué, prêt à rentrer chez lui, déjà prêt à clôturer cette affaire.

Mackenzie rentra la première dans la salle de conférence. De nombreux officiers de police étaient déjà assis à la grande table, certains en uniforme et d’autres en civil. Étant donné leur présence et l’apparition soudaine des camionnettes de journalistes, Mackenzie en déduisit qu’il y avait eu des fuites concernant cette affaire durant les deux heures et demie qui s’étaient écoulées entre le moment où elle avait quitté son bureau pour se rendre dans le champ de maïs et le moment où elle en était revenue. Ce n’était plus uniquement un meurtre horrible, c’était devenu un vrai show.

Mackenzie se servit une tasse de café et s’assit. Des dossiers avec les informations rassemblées jusqu’ici sur l’affaire étaient éparpillés sur la table. Elle y jeta un œil pendant que la salle se remplissait petit à petit. Porter finit par entrer et prit place à l’autre bout de la table.

Mackenzie jeta un coup d’oeil à son téléphone et vit qu’elle avait reçu huit appels en absence, cinq messages vocaux et une dizaine d’emails. C’était un dur rappel du fait qu’elle avait déjà une bonne série d’affaires en cours avant même d’avoir été envoyée au champ de maïs ce matin. Le côté ironique de sa situation était qu’en dépit de passer beaucoup de temps à la dénigrer et à l’insulter de manière subtile, ses collègues plus âgés avaient également conscience de son talent. Et par conséquent, elle était en charge du plus grand nombre de dossiers. Jusqu’à maintenant, elle n’avait jamais pris de retard et elle avait résolu un nombre exemplaire d’affaires.

Elle envisagea de répondre à certains des emails en attendant mais le chef de police Nelson entra avant qu’elle n’ait eu l’occasion de s’y mettre. Il ferma rapidement la porte de la salle de conférence derrière lui.

« Je ne sais pas comment les journalistes ont pu être au courant aussi vite, » grogna-t-il, « mais si j’apprends que l’un d’entre vous est responsable, ça va barder. »

Le silence envahit la pièce. Quelques policiers et employés commencèrent à feuilleter nerveusement les dossiers étalés en face d’eux. Bien que Mackenzie n’aime guère Nelson, elle devait admettre que sa présence et sa voix en imposaient sans aucun effort à une salle entière.

« Voilà où on en est. » dit Nelson. « La victime s’appelle Hailey Lizbrook, une strip-teaseuse d’Omaha, trente-quatre ans, mère de deux garçons âgés de neuf et quinze ans. D’après les informations que nous avons pu récolter, elle a été enlevée avant d’arriver au travail vu que son employeur affirme qu’elle ne s’est pas montrée au boulot la nuit dernière. Les caméras de sécurité du club Runway, l’endroit où elle travaillait, ne nous ont rien appris. Nous supposons donc qu’elle a été enlevée quelque part entre son appartement et le club de strip-tease. Ça couvre une distance de douze kilomètres, une zone où certains de nos hommes sont actuellement occupés à faire des recherches en collaboration avec le département de police d’Omaha. »

Il se tourna alors vers Porter en le regardant comme s’il s’agissait d’un premier de classe et il dit :

В« Porter, tu peux nous dГ©crire la scГЁne ? В»

Bien sГ»r, il avait choisi Porter.

Porter se mit debout et fit le tour de la pièce du regard afin de s’assurer qu’il avait l’attention de toutes les personnes présentes.

« La victime était attachée avec les mains dans le dos à un poteau en bois. La scène du crime se situe dans une clairière au milieu d’un champ de maïs, à un peu moins d’un kilomètre et demi de l’autoroute. Son dos était couvert de marques de lacérations, causées par une sorte de fouet. Nous avons observé la présence au sol de marques de même taille et de même forme que les lacérations. Même si nous ne serons absolument certains qu’après avoir reçu le rapport du médecin légiste, nous sommes presque sûrs qu’il ne s’agissait pas d’une attaque d’ordre sexuel même si la victime était dévêtue, ne portait plus que ses sous-vêtements et que ses vêtements n’ont pas pu être retrouvés. »

« Merci, Porter. » dit Nelson. « Concernant le médecin légiste, je l’ai eu au téléphone il y a environ vingt minutes. Il m’a dit que bien qu’il faille attendre les résultats de l’autopsie, la mort semble avoir été causée par une hémorragie ou un traumatisme crânien ou cardiaque. »

Il tourna alors les yeux vers Mackenzie et il y avait très peu de considération dans son regard lorsqu’il lui demanda : « White, quelque chose à ajouter ? »

В« Les chiffres. В» rГ©pondit-elle.

Nelson leva les yeux au ciel devant toutes les personnes présentes. C’était un signe flagrant de manque de respect mais elle passa outre, décidée à exposer ces données à toutes les personnes présentes avant d’être interrompue.

« J’ai découvert deux séries de chiffres, séparées par une barre oblique, gravées au pied du poteau. »

« Quels étaient ces chiffres ? » demanda l’un des jeunes policiers assis autour de la table.

В« Des chiffres et des lettres en fait. В» rГ©pondit Mackenzie. В« N 511 et J 202. Je les ai pris en photo avec mon tГ©lГ©phone. В»

« D’autres photos vous seront bientôt distribuées, dès que Nancy aura terminé de les imprimer. » dit Nelson. Il avait parlé d’une voix forte et énergique, faisant comprendre à toutes les personnes présentes que l’histoire des ces chiffres était maintenant close.

Mackenzie écoutait Nelson pendant qu’il expliquait d’un ton monocorde les tâches à réaliser pour couvrir les douze kilomètres séparant la maison de Hailey Lizbrook et le club Runway. Mais elle ne l’écoutait qu’à moitié en fait. Son esprit revenait continuellement sur la manière dont le corps de la femme avait été attaché. Il y avait quelque chose dans cette mise en scène qui lui avait paru tout de suite presque familier et cette pensée continuait à l’obséder alors qu’elle était assise dans cette salle de conférence.

Elle consulta les informations reprises dans le dossier, à la recherche d’un détail qui lui mettrait la puce à l’oreille. Elle feuilleta les quatre pages de résumé, espérant y découvrir quelque chose. Elle en connaissait déjà tous les détails mais elle les passa quand même en revue.

Femme de trente-quatre ans, probablement assassinée la nuit dernière. Présence de lacérations, d’entailles et d’abrasions au niveau du dos. Attachée à un vieux poteau en bois. Cause présumée du décès : hémorragie ou possible traumatisme cardiaque. La façon de l’attacher dénote un possible sous-entendu religieux. Le type morphologique du corps de la femme laisse entendre des motivations de type sexuel.

Alors qu’elle lisait le compte-rendu, quelque chose se fit jour en elle. Elle éloigna un peu le regard de son entourage afin de permettre à son esprit d’assembler les morceaux du puzzle sans aucune interférence.

Au moment où les choses commençaient à prendre forme dans sa tête, s’orientant vers une connexion qu’elle espérait être erronée, Nelson était sur le point de terminer sa présentation.

« …et vu qu’il est trop tard pour que des barrages routiers soient efficaces, nous allons devoir nous baser essentiellement sur les déclarations des témoins que nous allons éplucher jusqu’au moindre détail, même le plus anodin. Maintenant, est-ce que quelqu’un a quelque chose à ajouter ? »

В« Oui, une chose. В» dit Mackenzie.

Elle vit comment Nelson se retint de soupirer et elle entendit Porter glousser à l’autre bout de la table. Elle l’ignora et attendit de savoir comment Nelson allait lui répondre.

В« Oui, White ? В» dit-il.

« Je me rappelle d’une affaire datant de 1987 et qui présente beaucoup de similitudes avec celle-ci. Je suis presque sûre que ça s’est déroulé dans les environs de Roseland. La manière d’attacher la victime était similaire, le type morphologique de la femme également. Et je suis presque certaine que le type de torture aussi. »

В« 1987 ? В» demanda Nelson. В« White, Г©tiez-vous mГЄme dГ©jГ  nГ©e ? В»

Ce commentaire provoqua quelques rires étouffés d’une bonne partie des personnes présentes dans la salle. Mackenzie les ignora car elle ne comptait pas lâcher le morceau.

« Non, je n’étais pas née. », dit-elle, prête à l’affrontement. « Mais j’ai lu le rapport. »

« Monsieur, n’oubliez pas que Mackenzie passe son temps libre à réviser des affaires classées. Cette fille est un peu un genre d’encyclopédie ambulante dans le domaine. » intervint Porter.

Mackenzie remarqua directement que Porter l’avait non seulement appelée par son prénom mais qu’il l’avait également qualifiée de fille au lieu de femme. Le pire de tout, c’était qu’elle ne pensait même pas qu’il avait conscience de ce manque de respect.

Nelson se frotta la tГЄte de la main et laissa finalement Г©chapper un soupir tonitruant. В« 1987 ? Vous ГЄtes sГ»re ? В»

В« Presque certaine Г  100%. В»

В« Roseland ? В»

В« Ou dans les environs. В» dit-elle.

« OK. » répondit Nelson en regardant vers l’autre bout de la table où une femme d’âge mûr était assise, écoutant attentivement. Un ordinateur portable était posé devant elle, sur lequel elle avait pianoté silencieusement durant tout le temps de la réunion. « Nancy, pouvez-vous faire une recherche à ce sujet dans la base de données ? »

В« Oui, monsieur. В» rГ©pondit-elle. Elle se mit tout de suite Г  taper quelque chose dans le serveur interne du commissariat de police.

Nelson jeta un autre regard dГ©sapprobateur Г  Mackenzie et elle pouvait y lire clairement : Tu as plutГґt intГ©rГЄt Г  avoir raison. Sinon, tu viens juste de me faire perdre vingt secondes de mon temps prГ©cieux.

« OK les gars. » dit Nelson. « Voici comment on va procéder. Dès que cette réunion sera terminée, je veux que Smith et Berryhill se rendent à Omaha afin d’y aider le département local de police. À partir de là, on alternera par équipes, si nécessaire. Porter et White, je veux que vous alliez parler aux enfants de la victime, ainsi qu’à son employeur. Nous recherchons également l’adresse de sa sœur. »

В« Excusez-moi, monsieur. В» dit Nancy, en relevant la tГЄte de son ordinateur.

В« Oui, Nancy ? В»

« On dirait que la détective White avait raison. En octobre 1987, une prostituée a été retrouvée morte et attachée à un poteau en bois dans les environs de la ville de Roseland. Dans le dossier que je suis occupée à consulter, il est écrit que la victime ne portait que ses sous-vêtements et qu’elle avait été violemment fouettée. Aucun signe d’abus sexuel et aucun mobile non plus. »

Le silence se fit dans la pièce et de nombreuses questions planaient dans l’air. Finalement, ce fut Porter qui parla et bien que Mackenzie remarque directement qu’il cherchait à balayer l’affaire, elle sentit une pointe d’inquiétude dans sa voix.

« Ça date d’il y a presque trente ans. » dit-il. « Pour moi, c’est un peu léger comme connexion. »

« Mais c’est néanmoins une connexion. » répondit Mackenzie.

Nelson tapa du poing sur la table, le regard bouillonnant tourné vers Mackenzie. « S’il existe une connexion, vous savez ce que ça signifie, n’est-ce pas ? »

« Ça veut dire qu’il est possible qu’on ait affaire à un tueur en série. » dit-elle. « Et l’idée seule que nous puissions avoir affaire à un tueur en série signifie que nous devons envisager d’appeler le FBI. »

В« Mais vous allez un peu vite en besogne, lГ . В» dit Nelson. В« En fait vous ГЄtes prГЄte Г  rameuter la cavalerie pour peut-ГЄtre pas grand-chose. В»

« Avec tout le respect que je vous dois, » dit Mackenzie, « ça vaut la peine d’y regarder de plus près. »

« Et maintenant que votre cerveau encyclopédique l’a signalé à notre attention, nous n’avons plus le choix en fait. » dit Nelson. « Je vais passer quelques coups de fil et vous vous en chargerez. Pour l’instant, on va se concentrer sur les éléments urgents et pertinents. C’est tout pour l’instant. Vous pouvez tous retourner bosser. »

Le groupe présent à la salle de conférence commença à se disperser, en emportant les dossiers avec eux. Alors que Mackenzie se dirigeait vers la porte, Nancy lui adressa un sourire d’approbation. C’était le signe d’encouragement le plus important que Mackenzie ait reçu au boulot en plus de deux semaines. Nancy était réceptionniste et effectuait parfois des recherches d’informations pour le commissariat. Elle était l’un des rares membres plus âgés du commissariat qui n’avait pas de réels problèmes avec elle.

В« Porter et White, attendez ! В» dit Nelson.

Elle remarqua que Nelson montrait le même genre de préoccupation qu’elle avait vue et entendue chez Porter lorsqu’il avait pris la parole un peu plus tôt. Il en avait même l’air presque malade.

« Bon boulot pour le rappel de cette affaire de 1987 » dit Nelson à Mackenzie. On aurait dit que ça lui faisait physiquement mal de lui faire un compliment. « C’est un peu au petit bonheur la chance, mais si c’est le cas, il va falloir se demander… »

В« Se demander quoi ? В» dit Porter.

Mackenzie, qui n’était pas du genre à tourner autour du pot, répondit pour Nelson.

В« Se demander pourquoi il a mis autant de temps avant de redevenir actif, В» dit-elle.

Puis elle ajouta :

В« Et se poser la question de savoir quand il va recommencer Г  tuer. В»




CHAPITRE TROIS


Il était assis dans sa voiture, à profiter du silence environnant. Les réverbères jetaient une lueur fantomatique dans la rue. Il n’y avait pas beaucoup de voitures qui passaient à cette heure aussi tardive, ce qui créait une atmosphère sinistre. Il savait que toute personne qui se baladait à cette heure-ci dans ce quartier de la ville n’était probablement pas très à l’aise ou cherchait à faire ses affaires en secret. Ça lui facilitait sa tâche de concentration sur le travail à réaliser… sa Bonne Oeuvre.

Les trottoirs étaient sombres hormis la lumière occasionnelle venant des néons d’établissements miteux. La silhouette crue d’une femme bien dotée scintillait par la vitre du bâtiment qu’il observait. C’était comme la lueur vacillante d’un phare sur une mer déchaînée. Mais il n’y avait aucun refuge par ici, aucun refuge respectable du moins.

Alors qu’il était assis dans sa voiture, aussi éloigné que possible des réverbères, il pensa à la collection qu’il avait à la maison. Il l’avait examinée de près avant de sortir ce soir. C’était des souvenirs de son oeuvre qu’il gardait précieusement sur son bureau : un sac à main, une boucle d’oreille, un collier en or, une mèche de cheveux blonds placés dans un petit Tupperware. C’était des rappels, des rappels que cette tâche lui avait été assignée. Et qu’il avait encore beaucoup de travail à faire.

Un homme sortit de l’édifice de l’autre côté de la rue, l’interrompant dans ses pensées. Il resta assis là en observant, attendant patiemment. Il en avait appris beaucoup sur la patience au fil des ans. C’est pourquoi il était maintenant anxieux de savoir qu’il devait travailler rapidement. Et s’il n’était pas assez précis ?

Il n’avait pas beaucoup le choix. Le meurtre de Hailey Lizbrook faisait déjà la une des actualités. Des gens le recherchaient, comme si c’était lui qui avait fait quelque chose de mal. Ils ne comprenaient rien. Ce qu’il avait offert à cette femme, c’était un cadeau.

Un acte de bontГ©.

Auparavant, il laissait passer beaucoup de temps entre ses actes sacrés. Mais aujourd’hui, un sentiment d’urgence le pressait. Il y avait tellement à faire. Il y avait continuellement des femmes aux coins des rues, sur les pubs, à la télé.

Ils finiraient par comprendre. Ils comprendraient et ils le remercieraient. Ils lui demanderaient comment ГЄtre pur et il leur ouvrirait les yeux.

Quelques instants plus tard, l’image néon de la femme à travers la vitre disparut. Les lumières derrière les fenêtres s’éteignirent. L’endroit était devenu sombre, ils fermaient pour la nuit.

Il savait que ça voulait dire que les femmes allaient bientôt sortir par l’arrière, se diriger vers leurs voitures et rentrer chez elles.

Il enclencha une vitesse et roula lentement autour du pâté de maisons. La lumière des réverbères semblait le poursuivre mais il savait qu’il était à l’abri des regards. Dans ce quartier de la ville, personne ne se préoccupait des autres.

À l’arrière du bâtiment, la plupart des voitures étaient de beaux modèles. Apparemment, ça rapportait bien d’exposer son corps. Il se gara à l’extrémité du parking et attendit.

Après un long moment, la porte des employés s’ouvrit finalement. Deux femmes en sortirent, accompagnées d’un homme qui avait l’air d’être agent de sécurité pour l’établissement. Il observa l’homme, en se demandant s’il allait poser problème. Il gardait une arme sous son siège qu’il utiliserait si c’était absolument nécessaire mais il préférait éviter de le faire. Il n’avait pas encore été obligé de l’utiliser. En fait, il détestait les armes. Il y avait quelque chose d’impur à leur sujet, quelque chose de corrompu.

Ils finirent par se séparer, monter dans leurs voitures et s’éloigner.

Il vit d’autres personnes sortir, puis soudainement il se redressa sur son siège. Il sentit son cœur s’emballer. C’était elle. C’était celle qu’il attendait.

Elle était de petite taille, une fausse blonde avec une coupe au carré jusqu’au niveau des épaules. Il la regarda monter dans sa voiture mais ne démarra que lorsque ses feux arrière passèrent le coin de la rue.

Il contourna l’édifice par l’autre côté afin de ne pas attirer l’attention sur lui. Il se plaça juste derrière elle et son coeur commença à s’emballer. Instinctivement, il tendit la main sous son siège et toucha les brins de la corde. Ça le calmait.

Ça le calmait aussi de savoir qu’après la poursuite, viendrait le moment du sacrifice.

Et il viendrait, ça c’est sûr.




CHAPITRE QUATRE


Mackenzie était assise dans le siège passager, avec des nombreux dossiers étalés sur les genoux. Porter était derrière le volant, tapotant des doigts au rythme d’une chanson des Rolling Stones. Il avait toujours la même chaîne de rock allumée lorsqu’il conduisait et Mackenzie lui jeta un regard ennuyé, finalement déconcentrée. Elle regarda la trajectoire des phares se projetant sur la route devant eux à cent-trente kilomètres à l’heure puis elle se tourna vers lui.

« Tu peux baisser le son, s’il te plaît ? » dit-elle sèchement.

En général, ça ne la dérangeait pas mais elle essayait de se mettre dans un état d’esprit particulier afin de comprendre le mode opératoire du tueur.

Avec un soupir et un hochement de tГЄte, Porter baissa le son de la radio. Il la regarda de maniГЁre dГ©daigneuse.

« Qu’est-ce que tu espères trouver, de toutes façons ? » demanda-t-il.

« Je n’espère pas trouver quelque chose, » dit Mackenzie. « J’essaie de rassembler les différentes pièces du puzzle afin de mieux comprendre la personnalité du tueur. Si nous parvenons à penser comme lui, nous avons plus de chances de l’attraper. »

« Ou, » dit Porter, « tu peux attendre qu’on arrive à Omaha et qu’on parle avec les enfants et la soeur de la victime comme Nelson nous l’a demandé. »

Sans même le regarder, Mackenzie savait qu’il luttait pour ne pas lui sortir un commentaire paternaliste dans le style du type qui sait tout. Elle devait reconnaître que c’était tout à son honneur. Quand ils n’étaient que tous les deux sur les routes ou à une scène de crime, Porter maintenait les remarques sarcastiques et les comportements dégradants à un minimum.

Elle ignora Porter pendant un instant et regarda de nouveau les notes étalées sur ses genoux. Elle comparait les notes de l’affaire datant de 1987 et celles du meurtre de Hailey Lizbrook. Plus elle en lisait, plus elle était convaincue que le même type était responsable des deux meurtres. Mais ce qui la frustrait, c’était de ne pas parvenir à identifier un mobile précis.

Elle continua à examiner les différents documents, en feuilletant les pages et en faisant défiler les informations. Elle commença à murmurer tout haut, en se posant des questions et en énonçant les faits à haute voix. C’était quelque chose qu’elle faisait depuis le lycée, une manie dont elle n’était jamais parvenue à se débarrasser.

« Aucun indice d’abus sexuel dans les deux affaires, » dit-elle doucement. « Aucun lien manifeste entre les victimes à part leur profession. Pas de possibilité réelle de motivations religieuses. Pourquoi ne pas utiliser un crucifix en entier plutôt que de simples poteaux si c’était lié à la religion ? Les numéros étaient présents dans les deux affaires mais il n’y a pas de liens clairs entre les chiffres et les meurtres. »

В« Ne le prends pas mal, В» dit Porter, В« mais je prГ©fГ©rerais encore Г©couter les Stones. В»

Mackenzie arrêta de se parler à elle-même et remarqua que le témoin de notification de son téléphone clignotait. Après qu’elle et Porter se soient mis en route, elle avait envoyé un email à Nancy en lui demandant de faire quelques recherches rapides à travers les affaires de meurtres des trente dernières années avec les mots-clés poteau, strip-teaseuse, prostituée, serveuse, maïs, lacérations et la séquence de chiffres N511/J202. Quand Mackenzie jeta un coup d’œil à son téléphone, elle vit que Nancy, comme à son habitude, avait agi rapidement.

L’email que Nancy lui avait envoyé disait : Pas grand-chose, j’en ai bien peur. J’ai cependant envoyé en attachement les résumés des quelques affaires que j’ai trouvées. Bonne chance !

Il n’y avait que cinq pièces en attachement et Mackenzie parvint à les survoler assez rapidement. Trois des affaires n’avaient clairement aucun lien avec le meurtre de Lizbrook et l’affaire de 1987. Mais les deux autres présentaient assez d’éléments intéressants pour qu’elles vaillent la peine d’être prises en compte.

L’une d’entre elles était une affaire datant de 1994 où une femme avait été retrouvée morte derrière une grange abandonnée dans une zone rurale à environ cent-trente kilomètres d’Omaha. Elle avait été attachée à un poteau en bois et son corps était là depuis au moins six jours avant d’être découvert. Le cadavre était rigide et des animaux, probablement des lynx, avaient commencé à lui dévorer les jambes. La victime avait un passé judiciaire assez important, dont deux arrestations pour racolage. À nouveau, il n’y avait aucun signe d’abus sexuel et malgré des lacérations présentes dans son dos, elles étaient loin d’être aussi nombreuses que celles qui avaient été retrouvées sur le corps de Hailey Lizbrook. Le résumé sur l’affaire ne parlait pas non plus de chiffres découverts sur le poteau.

Le deuxième dossier avec d’éventuels liens avec cette affaire concernait une jeune fille de dix-neuf ans qui avait été portée disparue en 2009 lorsqu’elle n’était pas rentrée chez elle lors de ses vacances de Noël de l’Université du Nebraska. Lorsque son corps fut découvert trois mois plus tard dans un champ désert, partiellement enterré, des lacérations étaient présentes sur son dos. Des images furent plus tard diffusées à la presse, montrant la jeune fille nue et s’adonnant à une sorte de fête sexuelle choquante sur le campus. Les photos avaient été prises une semaine avant qu’elle n’ait été portée disparue.

Cette derniГЁre affaire prГ©sentait moins de similitudes mais Mackenzie estimait que les deux affaires pouvaient avoir des liens potentiels avec le meurtre de 1987 et celui de Hailey Lizbrook.

В« Tu as quelque chose de neuf ? В» demanda Porter.

« Nancy m’a envoyé le compte-rendu de certaines affaires qui pourraient être liées à la nôtre. »

В« Et quelque chose qui tient la route ? В»

Elle hésita puis elle lui fit part des deux liens potentiels. Quand elle eut terminé, Porter hocha la tête, le regard fixé à l’extérieur. Ils passèrent un panneau indiquant qu’Omaha ne se trouvait plus qu’à trente-cinq kilomètres.

« Je pense que tu t’efforces de trop parfois, » dit Porter. « Tu te démènes à fond et beaucoup de gens l’ont remarqué. Mais soyons honnêtes : peu importe les efforts que tu fasses, toutes les affaires ne se caractérisent pas par un lien énorme qui te permettrait d’avoir affaire à une enquête gigantesque. »

« Alors dis-moi, » dit Mackenzie. « En ce moment, qu’est-ce que ton instinct te dit au sujet de cette affaire ? À quoi est-on confronté ? »

« C’est juste un criminel de base ayant des problèmes avec les femmes, » dit Porter d’une manière dédaigneuse. « Si on parle avec assez de gens, on le retrouvera. Toute cette analyse n’est qu’une perte de temps. Tu n’attrapes pas des criminels en pensant comme eux. Tu les attrapes en posant des questions. Du travail de terrain, du porte à porte, de témoignage en témoignage. »

Alors que le silence s’installait entre eux, Mackenzie commença à se préoccuper de la vision simpliste qu’il avait du monde. Ça ne laissait aucune place aux nuances, à rien qui soit différent des ses certitudes prédéfinies. Elle était convaincue que le malade auquel ils avaient affaire était bien plus sophistiqué que ça.

« Et toi, qu’est-ce que tu penses de notre tueur ? » demanda-t-il finalement.

Elle ressentait une forme de ressentiment dans sa voix, comme s’il n’avait vraiment pas envie de lui poser la question mais que le silence l’y avait un peu forcé.

« Je pense qu’il déteste les femmes pour ce qu’elles représentent,” dit-elle doucement, mettant les pièces du puzzle en place dans son esprit au fur et à mesure qu’elle parlait. « Peut-être qu’il s’agit d’un puceau d’une cinquantaine d’années qui pense que le sexe est immonde, bien qu’il y ait aussi en lui ce besoin de sexe. Tuer des femmes lui donne la sensation de conquérir ses propres instincts, instincts qu’il considère immondes et inhumains. S’il peut éliminer la source dont proviennent ces désirs sexuels, il a l’impression de reprendre le contrôle. Les lacérations sur le dos des femmes indiquent une forme de punition, probablement pour leur nature provocatrice. Puis il y a aussi le fait qu’il n’y ait aucun signe d’abus sexuel. Ce qui me fait penser qu’il s’agit d’une sorte de tentative de purification dans les yeux du tueur. »

Porter hocha la tête, un peu à la façon d’un parent déçu.

« C’est de ça que je voulais parler, » dit-il. « Une perte de temps. Tu t’es tellement enfoncée dans cette histoire que tu ne sais même plus quoi penser et rien de tout ça ne va nous aider. Tu connais le dicton… les arbres cachent la forêt. »

Le silence gГЄnant reprit Г  nouveau le dessus. Ayant apparemment terminГ© de parler, Porter remonta le volume de la radio.

Ça ne dura cependant que quelques minutes. Alors qu’ils s’approchaient d’Omaha, Porter diminua à nouveau le volume de la radio sans y être invité cette fois. Porter se mit à parler mais il avait l’air nerveux. Mackenzie pouvait sentir les efforts qu’il faisait pour avoir l’air d’être celui qui dirigeait les opérations.

В« Tu as dГ©jГ  interviewГ© des enfants qui venaient de perdre un parent ? В» demanda Porter.

« Une fois, » dit-elle. « Après une fusillade au volant. Un petit garçon de onze ans. »

« Ça m’est déjà arrivé quelque fois aussi. Ce n’est pas très amusant. »

« Non, pas vraiment. » acquiesça Mackenzie.

« Bon écoute, on est sur le point d’aller interroger deux petits garçons au sujet de leur mère défunte. Le sujet de son lieu de travail finira par surgir. Il faut gérer la situation avec des pincettes, sans mauvais jeux de mots. »

Elle enrageait. Il lui parlait d’une manière condescendante comme si elle était un enfant.

« Laisse-moi diriger les choses. Tu pourras être l’épaule réconfortante s’ils se mettent à pleurer. Nelson a dit que la sœur serait également présente mais je doute qu’elle soit une source fiable de réconfort. Elle est probablement aussi dévastée que les enfants. »

Mackenzie n’était cependant pas convaincue que ce soit la meilleure idée. Mais elle savait aussi que quand il s’agissait de Porter et de Nelson, elle devait choisir ses batailles de manière intelligente. Alors si Porter voulait se charger de poser des questions aux deux enfants concernant leur mère défunte, elle le laisserait assouvir ce besoin d’égo.

В« Comme tu veux, В» dit-elle Г  travers ses dents serrГ©es.

Le silence envahit de nouveau le vГ©hicule. Cette fois-ci, Porter ne remonta pas le volume de la radio. Le seul bruit provenait des pages que Mackenzie feuilletait sur ses genoux. Une histoire plus importante Г©tait inscrite sur ses pages et dans ces documents que Nancy lui avait envoyГ©s. Mackenzie en Г©tait convaincue.

Bien entendu, pour pouvoir raconter une histoire, il fallait en connaître tous les personnages. Et pour l’instant, le personnage central se cachait toujours dans l’ombre.

La voiture ralentit et Mackenzy releva la tête au moment où ils entraient dans un quartier calme. Elle ressentit une douleur familière au creux de l’estomac et elle souhaita être n’importe où ailleurs.

Ils étaient sur le point de parler avec les enfants d’une femme décédée.




CHAPITRE CINQ


Mackenzie fut surprise lorsqu’elle entra dans l’appartement de Hailey Lizbrook. Ce n’était pas du tout ce à quoi elle s’attendait. L’endroit était propre et bien rangé, les meubles étaient disposés avec soin et époussetés. La décoration était très similaire à celle d’une femme au foyer, jusqu’aux tasses de café avec de jolies inscriptions et les casseroles pendues à des crochets ornés près de la cuisinière. Il était clair qu’elle gérait son intérieur d’une main experte, jusqu’aux coupes de cheveux et aux pyjamas de ses fils.

Ça ressemblait très fort au type de famille et d’intérieur qu’elle avait toujours rêvé d’avoir.

Mackenzie se rappela que les garçons avaient neuf et quinze ans. Le plus âgé s’appelait Kevin et le plus jeune Dalton. Au moment de les rencontrer, elle se rendit tout de suite compte que Dalton avait beaucoup pleuré, ses yeux bleus étaient encerclés de poches rouges.

Kevin, par contre, avait surtout l’air en colère. Alors qu’ils s’installaient et que Porter commença à mener la discussion, la colère de Kevin était d’autant plus visible que Porter essayait de leur parler sur un ton oscillant entre la condescendance et celui d’un instituteur de maternelle. Mackenzie se sentait mal à l’aise au fur et à mesure que Porter continuait à parler.

« Maintenant, ce que j’aimerais savoir, c’est si votre mère avait beaucoup d’amis hommes, » dit Porter.

Il se tenait debout au centre de la piГЁce et les enfants Г©taient assis sur le divan du salon. La sЕ“ur de Hailey, Jennifer, se trouvait dans la cuisine adjacente, fumant une cigarette prГЁs de la cuisiniГЁre avec la hotte allumГ©e.

В« Vous voulez dire, comme un petit ami ? В» demanda Dalton.

« Bien sûr, ça pourrait être un ami homme, » dit Porter. « Mais je ne voulais pas seulement dire dans ce sens-là. Tout homme avec qui elle aurait pu avoir une conversation plus qu’une seule fois. Même quelqu’un comme un facteur ou un homme au supermarché. »

Les deux garçons regardaient Porter comme s’ils s’attendaient à ce qu’il leur fasse un tour de magie. Mackenzie le regardait de la même manière. Elle ne l’avait jamais entendu utiliser un ton aussi doux. C’était presque marrant d’entendre un tel son apaisant sortant de sa bouche.

В« Non, je ne pense pas, В» dit Dalton.

« Non, » acquiesça Kevin. « Et elle n’avait pas non plus de petit ami. Pas que je sache. »

Mackenzie et Porter interrogèrent Jennifer du regard. Ils n’eurent qu’un haussement d’épaule pour réponse. Mackenzie était convaincue que Jennifer était en état de choc. Elle se demandait s’il y avait éventuellement un autre membre de la famille qui pourrait s’occuper de ces deux petits garçons pendant quelques temps, vu qu’il était clair que Jennifer n’était certainement pas en condition pour l’instant de faire office de tutrice.

« OK. Et concernant les gens avec lesquels vous et votre maman ne vous entendiez pas ? » demanda Porter. « L’avez-vous déjà entendue se disputer avec quelqu’un ? »

Dalton se contenta de hocher de la tête. Mackenzie était sûre que le petit garçon était sur le point d’éclater à nouveau en sanglots. Quant à Kevin, il leva les yeux au ciel tout en fixant Porter du regard.

« Non, » dit-il. « Et on n’est pas stupide. On sait ce que vous essayez de savoir. Vous voulez savoir s’il y a une personne qui aurait pu éventuellement vouloir tuer notre mère, n’est-ce pas ? »

Porter eut l’air soudainement d’avoir reçu un uppercut. Il jeta un coup d’œil nerveux vers Mackenzie mais parvint à reprendre son calme assez rapidement.

« Oui, de fait, » dit-il. « C’est là où je voulais en venir. Mais il semblerait que vous n’avez aucune information à ce sujet. »

В« Vous pensez ? В» dit Kevin.

Il y eut un moment de tension oГ№ Mackenzie pensa que Porter allait se lГўcher avec le gosse. Kevin regardait Porter avec une expression douloureuse, le mettant presque au dГ©fi de continuer.

« Bon, » dit Porter, « je pense que je vous ai assez ennuyés. Merci d’avoir répondu à mes questions. »

« Attendez, » dit Mackenzie. L’objection était sortie de sa bouche avant même qu’elle n’ait eut le temps de la retenir.

Porter lui jeta un regard foudroyant. Il était clair qu’il avait l’impression de perdre son temps en parlant avec ces deux petits garçons et tout spécialement avec un adolescent de quinze ans qui avait de sérieux problèmes avec l’autorité. Mackenzie ignora son regard et s’agenouilla au niveau des yeux de Dalton.

В« Tu penses que tu pourrais aller voir ta tante dans la cuisine pendant un instant ? В»

« Oui, » répondit Dalton, d’une voix basse et rauque.

« Détective Porter, pourquoi vous ne l’accompagneriez pas ? »

De nouveau, le regard que Porter lui adressa était rempli de haine. Mackenzie le fixa droit dans les yeux de manière inébranlable. Son visage se durcit et elle était bien décidée à rester sur ses positions. S’il voulait en discuter, ils le feraient à l’extérieur. Mais il était clair que même dans une situation avec deux enfants et une femme presque catatonique, il n’avait aucune envie d’être humilié.

В« Bien sГ»r, В» finit-il par dire, les dents serrГ©es.

Mackenzie attendit un instant que Porter et Dalton soient parvenus jusque dans la cuisine.

Mackenzie se remit debout. Elle savait qu’à partir de l’âge de douze ans environ, la tactique de se mettre au niveau des yeux arrêtait de fonctionner avec les enfants.

Elle regarda Kevin et vit que l’attitude de défi qu’il avait montrée à Porter était toujours présente. Mackenzie n’avait rien contre les adolescents mais elle savait qu’il était souvent difficile qu’ils coopèrent, surtout dans le cadre de circonstances tragiques. Mais elle avait vu comment Kevin avait répondu à Porter et elle pensait pouvoir parvenir à communiquer avec lui.

« Mettons les choses à plat, Kevin, » dit-elle. « Tu as l’impression qu’on est venu trop tôt ? Tu penses que nous faisons preuve de manque de considération en posant ces questions juste après que vous ayez appris la triste nouvelle au sujet de votre maman ? »

В« En quelque sorte, В» dit-il.

« Tu n’as juste pas envie de parler pour l’instant ? »

« Non, je n’ai pas de problèmes pour parler, » dit Kevin. « Mais ce type est un connard. »

Mackenzie savait que c’était l’occasion à ne pas manquer. Elle pouvait affecter une approche professionnelle et formelle comme elle le ferait en temps normal ou elle pouvait utiliser cette opportunité pour établir une communication avec un adolescent en colère. Les adolescents chérissaient l’honnêteté par-dessus tout, ça elle le savait. Ils avaient la capacité de voir clair lorsqu’ils étaient guidés par leurs émotions.

« Tu as raison, » dit-elle. « C’est un connard. »

Kevin la fixa du regard, les yeux grand ouverts. Elle l’avait pris au dépourvu. Il était clair qu’il ne s’était pas attendu à cette réponse.

В« Mais Г§a ne change pas le fait que je doive travailler avec lui, В» ajouta-t-elle, la voix remplie de sympathie et de comprГ©hension. В« Г‡a ne change pas non plus le fait que nous sommes ici pour vous aider. Nous voulons trouver la personne qui a fait Г§a Г  votre mГЁre, pas toi ? В»

Il resta silencieux durant un long instant, puis il finit par hocher de la tГЄte.

В« Tu penses que tu pourrais me parler Г  moi, alors ? В» demanda Mackenzie. В« Juste quelques questions rapides, puis nous nous en irons. В»

В« Et qui viendra aprГЁs Г§a ? В» demanda Kevin de maniГЁre prudente.

В« HonnГЄtement ? В»

Kevin hocha la tête et elle vit qu’il était sur le point de pleurer. Elle se demandait s’il n’avait pas retenu ses larmes durant tout ce temps pour se montrer fort devant son frère et sa tante.

« Et bien, après que nous soyons partis, nous ferons passer toutes les informations que nous avons pu obtenir. Ensuite, les services sociaux viendront s’assurer que votre tante Jennifer est apte à prendre soin de vous pendant que tout s’organise pour votre maman. »

В« Elle est chouette la plupart du temps, В» dit Kevin, en jetant un regard vers Jennifer. В« Mais elle et maman Г©taient vraiment trГЁs proches. Comme des meilleures amies. В»

« C’est comme ça entre sœurs, » répondit Mackenzie, sans savoir si c’était vrai ou pas. « Mais pour l’instant, j’ai besoin de savoir si tu peux te concentrer sur mes questions. Est-ce que tu peux y arriver ? »

В« Oui. В»

« Tant mieux. Alors maintenant, je n’aime pas du tout te poser cette question mais c’est nécessaire. Tu sais ce que ta maman faisait comme boulot ? »

Kevin hocha de la tГЄte en baissant les yeux.

« Oui, » dit-il. « Et je ne sais pas comment, mais les enfants à l’école le savent aussi. J’imagine que le père de quelqu’un a dû se rendre au club, l’y voir et la reconnaître suite à un événement scolaire ou quelque chose dans le genre. Ça craint. On me charriait continuellement à ce sujet. »

Mackenzie ne parvenait pas à imaginer ce type de tourment mais elle avait encore d’autant plus de respect pour Hailey Lizbrook. Bien sûr, elle faisait des strip-teases la nuit pour gagner de l’argent mais durant le jour, elle était apparemment une mère impliquée dans la vie de ses enfants.

« OK, » dit Mackenzie. « En sachant le travail qu’elle faisait, peux-tu imaginer quel est le type d’hommes qui se rend dans ce genre d’endroit ? »

Kevin hocha de la tГЄte et Mackenzie vit une premiГЁre larme couler le long de sa joue. Elle Г©tait sur le point de lui prendre la main pour le rГ©conforter mais elle ne voulait pas non plus le contrarier.

« Je voudrais que tu réfléchisses et que tu me dises si ta maman est déjà rentrée à la maison vraiment fâchée ou contrariée au sujet de quelque chose. Je voudrais aussi que tu réfléchisses au sujet de tout homme qui pourrait… tout homme qui aurait pu rentrer à la maison avec elle. »

« Personne ne rentrait jamais avec elle, » dit-il. « Et j’ai rarement vu maman fâchée ou contrariée au sujet de quoi que ce soit. La seule fois où je l’ai vue fâchée, c’était quand elle avait affaire aux avocats l’année dernière. »

В« Des avocats ? В» demanda Mackenzie. В« Tu sais pourquoi elle parlait avec des avocats ? В»

« En quelque sorte. Je sais que quelque chose est arrivé un soir au travail et qu’elle a fini par parler avec des avocats. J’entendais des bribes quand elle en parlait au téléphone. Je suis presque certain qu’elle leur parlait d’une injonction restrictive. »

« Et tu penses que ça avait à voir avec l’endroit où elle travaillait ? »

« Je n’en suis pas certain, » répondit Kevin. Son visage s’était quelque peu déridé après avoir eu l’impression de dire quelque chose qui pourrait être utile. « Mais je pense. »

« Ça va beaucoup nous aider, Kevin, » dit Mackenzie. « Est-ce qu’il y a quoi que ce soit d’autre auquel tu peux penser ? »

Il secoua lentement la tête puis regarda Mackenzie dans les yeux. Il essayait de rester fort mais il y avait tellement de tristesse dans son regard que Mackenzie se demandait comment il n’avait pas encore craqué.

« Maman en avait honte, vous savez ? » dit Kevin. « Elle travaillait un peu depuis la maison durant la journée. Elle faisait des sites internet et de la rédaction, ce genre de choses. Mais je ne pense pas qu’elle gagnait beaucoup d’argent. Elle faisait l’autre boulot pour gagner plus d’argent car notre père… il a cassé les ponts il y a longtemps. Il n’envoie plus jamais d’argent. Alors maman… elle a dû accepter cet autre boulot. Elle le faisait pour moi et pour Dalton et… »

« Je sais, » dit Mackenzie et cette fois-ci elle s’approcha de lui. Elle lui posa la main sur l’épaule et il eut l’air d’en être reconnaissant. Elle voyait bien aussi qu’il avait vraiment envie de pleurer mais qu’il n’allait probablement pas le faire devant des étrangers.

« Détective Porter, » appela Mackenzie. Porter apparut depuis l’autre pièce, en la fixant du regard. « Vous avez encore des questions à poser ? » Elle secoua subtilement la tête en posant cette question, en espérant qu’il comprendrait le message.

« Non, je pense que c’est tout, » dit Porter.

В« OK, В» dit Mackenzie. В« Encore merci pour le temps que vous nous avez consacrГ©. В»

« Oui, merci, » dit Porter, en rejoignant Mackenzie dans le salon. « Jennifer, vous avez mon numéro. Si vous pensez à quoi que ce soit qui puisse nous aider, n’hésitez pas à appeler. Même un détail des plus infimes peut s’avérer utile. »

Jennifer hocha de la tête et parvint à dire merci d’une voix enrouée.

Mackenzie et Porter se dirigèrent vers la sortie, descendirent une volée de marches en bois et s’engagèrent dans le parking de l’immeuble d’appartements. Quand ils furent à une certaine distance de l’appartement, Mackenzie rattrapa Porter. Elle sentait une immense colère émaner de lui mais elle l’ignora.

« J’ai une piste, » dit-elle. « Kevin m’a dit que sa mère avait déposé une injonction restrictive l’année dernière contre une personne à son boulot. Il a dit que c’était la seule fois où il l’avait vue visiblement fâchée ou contrariée au sujet de quelque chose. »

« Tant mieux, » dit Porter. « Au moins quelque chose de positif est ressorti du fait que tu m’aies mis à l’écart. »

« Je ne t’ai pas mis à l’écart, » dit Mackenzie. « J’ai simplement vu que la situation ne s’arrangeait pas entre toi et le plus âgé des garçons, alors je suis intervenue afin d’y apporter une solution. »

« C’est des conneries, » dit Porter. « Tu m’as fait paraître faible et inférieur devant ces enfants et leur tante. »

« Ce n’est pas vrai, » répondit Mackenzie. « Et même si c’était vrai, en quoi c’est important ? Tu parlais à ces gosses comme si c’était des idiots qui comprenaient à peine le français. »

« Tes actes ont clairement fait preuve d’un manque de respect, » dit Porter. « Je te rappelle que je fais ce boulot depuis avant que tu naisses. Si j’ai besoin que tu interviennes pour m’aider, je te le ferai savoir. »

« Tu avais terminé, Porter, » répondit-elle. « Tu avais terminé de leur parler, tu te rappelles ? Tu n’avais rien de plus à leur dire. Tu étais déjà sur le pas de la porte et ce n’était pas le bon choix. »

Ils Г©taient maintenant arrivГ©s Г  la voiture et en la dГ©verrouillant, Porter regarda furieusement Mackenzie dans les yeux par-dessus le toit du vГ©hicule.

« Quand on sera rentré au commissariat, je vais faire une demande à Nelson pour être réassigné. J’en ai assez de ce manque de respect. »

В« Manque de respect, В» dit Mackenzie, en secouant la tГЄte. В« Tu ne connais mГЄme pas la signification de ce mot. Pourquoi tu ne commences pas par regarder la maniГЁre dont tu me traites. В»

Porter laissa échapper un soupir et rentra dans la voiture sans ajouter un mot. Décidée à ne pas laisser l’humeur tendue de Porter affecter son moral, Mackenzie rentra également dans le véhicule. Elle se retourna pour regarder l’appartement et se demanda si Kevin s’était finalement laissé aller à pleurer. Tout bien considéré, les tensions entre elle et Porter étaient bien peu de choses.

« Tu fais passer l’information ? » demanda Porter, visiblement fâché d’avoir été mis à l’écart.

« Oui, » dit-elle, en sortant son téléphone. Alors qu’elle cherchait le numéro de Nelson, elle sentit un sentiment de satisfaction l’envahir. Une injonction restrictive placée il y a un an et maintenant Hailey Lizbrook était morte.

On a notre homme, pensa-t-elle,

Mais en même temps, elle ne pouvait pas s’empêcher de penser que clôturer cette affaire ne pouvait pas être aussi facile.




CHAPITRE SIX


Mackenzie arriva finalement chez elle à 22h45. Elle était exténuée. La journée avait été longue et épuisante mais elle savait déjà qu’elle ne s’endormirait probablement pas tout de suite. Toutes ses pensées étaient concentrées sur la piste que Kevin Lizbrook lui avait fournie. Elle avait passé l’information à Nelson qui lui avait assuré qu’un de ses hommes appellerait le club de strip-tease ainsi que le cabinet d’avocats avec lequel Hailey Lizbrook avait obtenu son injonction restrictive.

Sans cesser d’y penser, Mackenzie mit un peu de musique, prit une bière dans le frigo et se fit couler un bain. Elle n’était pas vraiment fan des bains mais ce soir tous les muscles de son corps avaient besoin de se relâcher. Pendant que la baignoire se remplissait, elle se balada à travers la maison en rangeant les affaires que Zack avait laissées traîner, attendant probablement encore la dernière minute avant de partir bosser.

Elle et Zack avaient emménagé ensemble il y avait un peu plus d’un an, s’efforçant de passer par toutes les étapes de leur relation afin de postposer le mariage le plus longtemps possible. Mackenzie se sentait prête à se marier mais Zack était terrifié à l’idée. Ils étaient ensemble depuis trois ans maintenant et les deux premières années avaient été fantastiques. Mais cette dernière année avait surtout été marquée par la monotonie et la peur que Zack ressentait à l’idée d’être seul ou d’être marié. S’il pouvait rester quelque part entre ces deux états, avec Mackenzie en tant que tampon, il serait vraiment heureux.

Cependant, pendant qu’elle ramassait deux assiettes sales laissées sur la table du salon et enjambait un disque Xbox qui traînait au sol, Mackenzie se demanda si elle n’en avait pas un peu assez de n’être qu’un tampon. En plus de ça, elle n’était pas vraiment sûre qu’elle accepte de se marier avec Zack, même s’il lui faisait sa demande demain. Elle ne le connaissait que trop bien. Elle avait vu à quoi pouvait ressembler sa vie mariée avec lui et franchement ce n’était pas très tentant.

Elle était coincée dans une relation sans issue, avec un partenaire qui ne l’appréciait pas à sa juste valeur. De la même manière, elle se rendit compte qu’elle était coincée dans un boulot avec des collègues qui ne l’appréciaient pas beaucoup non plus. On aurait dit que toute sa vie était coincée. Elle savait qu’elle devait y changer quelque chose mais ça lui semblait une tâche énorme. Et puis avec son état avancé de fatigue, elle n’en avait juste pas l’énergie.

Mackenzie se rendit dans la salle de bains et arrêta le robinet. Des volutes de vapeur s’échappaient de la surface de l’eau. C’était comme une invitation à y entrer. Elle se déshabilla en se regardant dans le miroir et se rendit d’autant plus compte qu’elle avait gâché trois ans de sa vie avec un homme qui n’avait absolument aucune envie de s’engager avec elle. Elle se trouvait attrayante, avec son style naturel. Son visage était joli (peut-être même encore un peu plus quand elle attachait ses cheveux) et elle avait une silhouette solide, mince et musclée. Son ventre était plat et dur, tellement dur que parfois Zack plaisantait en disant que ses abdos l’intimidaient.

Elle se glissa dans la baignoire et posa la bière sur une petite table à côté d’elle. Elle respira profondément et laissa l’eau chaude faire son oeuvre. Elle ferma les yeux et se détendit autant que possible mais elle ne parvenait pas à oublier les yeux de Kevin Lizbrook. La profonde tristesse qui s’y lisait avait été presqu’insupportable. Elle lui rappelait la douleur qu’elle avait un jour ressentie mais qu’elle était parvenue à repousser au plus profond d’elle-même.

Elle ferma les yeux et somnola, sans que cette image ne la quitte. Elle sentit une présence palpable, comme si Hailey Lizbrook était avec elle dans la pièce, l’exhortant à résoudre l’affaire de son meurtre.



*



Zack rentra à la maison une heure plus tard, après son quart de douze heures dans une usine de textile du coin. À chaque fois que Mackenzie sentait l’odeur de crasse, de sueur et de graisse sur lui, ça lui rappelait combien Zack avait peu d’ambition. Mackenzie n’avait rien contre ce boulot en soi. C’était un travail respectable fait pour des hommes qui voulaient se consacrer au dur labeur. Mais Zack avait un diplôme de licence qu’il avait eu l’intention d’utiliser afin d’obtenir une place dans un programme de maîtrise pour devenir professeur. Il avait abandonné cette idée il y a cinq ans et il était depuis lors coincé dans un poste de chef de quart à l’usine de textile.

Mackenzie en était à sa deuxième bière au moment où il rentra. Elle était assise sur le lit à lire un bouquin. Elle avait pensé s’endormir vers trois heures du matin afin d’avoir cinq heures de sommeil derrière elle avant de se rendre au boulot à neuf heures le lendemain matin. Elle n’avait jamais vraiment eu besoin de beaucoup dormir et les nuits où elle avait dormi plus de six heures, elle avait été complètement léthargique et à moitié endormie toute la journée du lendemain.

Zack entra dans la chambre avec ses vêtements miteux de travail. Il lança ses chaussures à côté du lit et l’observa. Elle portait un débardeur et un short cycliste.

« Salut, chérie, » dit-il, la dévorant des yeux. « C’est agréable de rentrer à la maison et de voir un tel spectacle. »

« Comment s’est passée ta journée ? » demanda-t-elle, en levant à peine les yeux de son livre.

« Ça a été, » dit-il. « Puis je suis rentré à la maison et je t’ai trouvée dans cette tenue et d’un coup tout a été beaucoup mieux. » Il disait cela tout en rampant sur le lit dans sa direction. Sa main toucha le côté de son visage alors qu’il cherchait à lui donner un baiser.

Elle laissa tomber son livre et s’éloigna brusquement. « Zack, tu as perdu la tête ? » demanda-t-elle.

В« Quoi ? В» dit-il, visiblement dГ©concertГ©.

« Tu es tout sale et dégoûtant. Non seulement j’ai prix un bain mais en plus tu es occupé à tacher les draps de crasse, de graisse et de que sais-je encore. »

В« Ah, fait chier, В» dit Zack, visiblement contrariГ©. Il roula en-dehors du lit, en faisant exprГЁs de toucher les draps autant que possible. В« Pourquoi tu es aussi coincГ©e ? В»

« Je ne suis pas coincée, » dit-elle. « Je n’ai juste pas envie de vivre dans une porcherie. Au fait, merci pour avoir rangé et ramassé tes affaires avant d’aller travailler. »

« C’est vraiment chouette de rentrer à la maison, » ricana Zack, en se dirigeant vers la salle de bains et en fermant la porte derrière lui.

Mackenzie soupira et avala le reste de sa bière cul sec. Elle regarda alors en direction des bottines sales que Zack avait laissées traîner au sol. Elle savait qu’elles y resteraient jusqu’à ce qu’il les enfile le lendemain. Elle savait également que lorsqu’elle se lèverait demain matin et se rendrait dans la salle de bains pour se préparer, elle y trouverait ses habits sales empilés sur le sol.

Au diable tout ça, pensa-t-elle, en se penchant à nouveau sur son bouquin. Elle ne lut que quelques pages tout en entendant Zack qui prenait sa douche dans la salle de bains. Elle mit le livre de côté et retourna jusqu’au salon. Elle ramassa son porte-document, le ramena dans la chambre et en sortit les dossiers les plus actualisés sur le meurtre Lizbrook qu’elle avait récupérés au commissariat avant de rentrer à la maison. Même si elle avait vraiment envie de se reposer, ne serait-ce que quelques heures, elle n’y parvenait pas.

Elle examina les dossiers, à l’affût de tout détail qu’ils auraient éventuellement négligé. Une fois qu’elle fut certaine que tout avait été traité, elle revit de nouveau les yeux remplis de larmes de Kevin et ça la motiva à reprendre de nouveau les dossiers.

Mackenzie était tellement absorbée par ses dossiers qu’elle ne remarqua pas que Zack entrait dans la pièce. Il sentait bien meilleur maintenant et avec seulement une serviette autour de la taille, il était bien plus attirant aussi.

« Désolé pour les draps, » dit Zack sur un ton un peu absent, tout en laissant tomber sa serviette et en enfilant un boxer. « Je… Je ne sais pas… Je ne me rappelle plus à quand date la dernière fois où tu as fait un peu attention à moi. »

« Tu veux parler de sexe ? » demanda-t-elle. Elle venait de se rendre compte qu’elle était étonnamment d’humeur à faire des galipettes. Peut-être que c’était tout ce dont elle avait besoin pour finalement se relaxer et s’endormir.

« Pas seulement le sexe, » dit Zack. « Je me réfère à tout type d’attention. Je rentre à la maison et je te trouve soit déjà endormie, soit à lire des comptes-rendus d’affaires. »

« Ça, c’est après avoir ramassé toute la merde que tu as laissée traîner toute la journée, » dit-elle. « Tu vis comme un petit garçon qui s’attend à ce que sa maman range derrière lui. Alors oui, des fois je me replonge dans le boulot, histoire d’oublier combien tu peux être frustrant parfois. »

В« De nouveau la mГЄme chose ? В» demanda-t-il.

В« Quelle mГЄme chose ? В»

« Tu utilises de nouveau ton travail comme un moyen de m’ignorer ? »

« Je ne l’utilise pas comme un moyen de t’ignorer, Zack. Mais là maintenant, je suis plus préoccupée par le fait d’attraper l’homme qui a brutalement assassiné la mère de deux enfants plutôt que de m’assurer que tu aies toute l’attention dont tu as besoin. »

« Ça, c’est exactement la raison pour laquelle je ne suis vraiment pas pressé de me marier. Tu es déjà mariée avec ton boulot, » répondit Zack.

Elle aurait pu lui répondre d’une centaine de manières différentes mais Mackenzie savait que ça n’en valait pas la peine. Elle savait qu’au fond, il avait raison, d’une certaine façon. La plupart du temps, elle trouvait les comptes-rendus d’affaires qu’elle ramenait à la maison plus intéressants que Zack. Elle l’aimait toujours, bien sûr, mais il ne lui apportait rien de neuf, aucun défi.

В« Bonne nuit, В» dit-il sur un ton amer, en se glissant dans le lit.

Elle regarda son dos nu et elle se demanda si, d’une certaine manière, elle ne devrait pas lui accorder plus d’attention. Ça ferait d’elle une meilleure petite amie, non ? Est-ce que ça ferait d’elle un meilleur investissement pour un homme qui était terrifié à l’idée du mariage ?

Avec la possibilité du sexe définitivement enterrée, Mackenzie haussa tout simplement les épaules et se remit à lire les dossiers de l’affaire.

Si sa vie personnelle devait disparaître en arrière-plan, et bien tant pis. Cette vie, la vie à l’intérieur de cette affaire, lui semblait de toutes façons bien plus réelle à ses yeux.



*



Mackenzie rentra dans la chambre de ses parents et avant de passer le seuil, elle sentit une odeur qui lui retourna l’estomac. C’était une odeur qui lui piquait au nez et qui lui rappelait l’intérieur de sa tirelire, c’était comme une odeur métallisée.

Elle entra dans la chambre et vit l’extrémité du lit, un lit où sa mère n’avait plus dormi depuis plus d’un an. Un lit bien trop grand pour son père tout seul.

Elle le vit allongé sur le lit, les jambes pendant sur le côté, les bras étendus comme s’il allait s’envoler. Il y avait du sang partout : sur le lit, au mur et même jusqu’au plafond. Il avait la tête tournée vers la droite, comme s’il évitait de la regarder.

Elle sut tout de suite qu’il était mort.

Elle s’avança vers lui, ses petits pieds de fillette de sept ans s’avançant à pas feutrés dans une marre de sang. Elle n’avait pas vraiment envie de s’approcher mais elle en avait besoin.

В« Papa, В» murmura-t-elle, en pleurs.

Elle tendit la main, terrifiГ©e, mais attirГ©e comme un aimant.

Soudain, il se retourna et la fixa. Il Г©tait toujours mort.

Mackenzie hurla.

Mackenzie ouvrit les yeux et jeta un regard autour de la pièce dans une sorte de confusion totale. Les dossiers de l’enquête étaient étalés sur ses genoux. Zack dormait à côté d’elle, en lui tournant toujours le dos. Elle inspira profondément, essuyant la sueur de son front. Ce n’était qu’un rêve.

Puis elle entendit un grincement.

Mackenzie s’immobilisa. Elle regarda vers la porte de la chambre et sortit lentement du lit. Elle avait entendu le plancher du salon grincer, un son qu’elle n’avait entendu que lorsque quelqu’un marchait dans le salon. Bien sûr, elle dormait et s’était réveillée en plein cauchemar, mais elle l’avait entendu, ce grincement.

Ou pas ?

Elle sortit du lit et s’empara de son arme de service qui se trouvait sur le haut de la commode où elle laissait également son badge et son sac à main. Elle contourna silencieusement le seuil de la chambre et s’avança dans le hall. La lueur ambiante des réverbères filtrait à travers les persiennes du salon, révélant une pièce déserte.

Elle entra dans la pièce en levant son arme. Son instinct lui disait qu’il n’y avait personne mais elle se sentait toujours secouée. Elle savait qu’elle avait entendu le plancher grincer. Elle s’avança jusqu’à cet endroit précis du salon, juste devant la table basse, et elle entendit le plancher grincer.

Le visage de Hailey Lizbrook surgit de nulle part et envahit ses pensées. Elle vit les lacérations sur le dos de la femme et les traces au sol. Elle frissonna. Elle regarda silencieusement l’arme qu’elle tenait en main et essaya de se rappeler la dernière fois qu’une enquête l’avait autant affectée. Mais à quoi avait-elle pensé ? Que le tueur était rentré dans son salon pour l’observer ?

Irritée, Mackenzie retourna dans la chambre. Elle reposa doucement l’arme sur la commode et retourna au lit.

Elle se sentait toujours un peu effrayГ©e et envahie par les souvenirs de son rГЄve. Mackenzie se recoucha, ferma les yeux et essaya de se rendormir.

Mais elle savait que de durs moments l’attendaient. Elle se savait rongée par l’image des morts et des vivants.




CHAPITRE SEPT


Mackenzie n’avait jamais vu le commissariat aussi frénétique. La première chose qu’elle vit en arrivant, ce fut Nancy qui courait dans le hall vers le bureau de quelqu’un. Elle n’avait jamais vu Nancy se déplacer aussi vite. Et au-delà de ça, les visages de tous les policiers qu’elle croisa en se rendant vers la salle de conférence étaient remplis d’angoisse.

Ça allait être une matinée pleine d’événements. Il y avait une forme de tension dans l’air qui lui rappelait la lourdeur précédant une violente tempête d’été.

Elle avait elle-même ressenti un peu de cette tension avant même de quitter la maison. Elle avait reçu le premier appel à 7h30, l’informant qu’une action allait être entamée dans les prochaines heures, suite à la piste qu’elle avait trouvée. Apparemment, pendant qu’elle dormait, la piste qu’elle avait obtenue de Kevin s’était avérée très prometteuse. Un mandat avait été obtenu et un plan d’action avait été mis en place. Une chose était déjà sûre par contre : Nelson voulait que ce soit elle et Porter qui ramènent le suspect.

Les dix minutes qu’elle passa au commissariat passèrent en coup de vent. Pendant qu’elle se versait une tasse de café, Nelson aboyait des ordres à tout le monde pendant que Porter restait assis gravement sur une chaise à la table de conférence. Porter avait l’air d’un enfant boudeur cherchant à obtenir de l’attention. Elle savait que ça le travaillait que cette piste soit venue d’un garçon avec lequel Mackenzie avait parlé. Un garçon dont il avait pensé qu’il n’offrirait pas de nouveaux indices.

Mackenzie et Porter allaient mener l’opération et deux autres voitures furent affectées pour leur apporter de l’aide si nécessaire. C’était la quatrième fois dans sa carrière qu’on lui assignait une telle mission et la montée d’adrénaline était toujours bien présente. En dépit de l’élan d’énergie qui l’animait, Mackenzie restait calme et posée. Elle sortit de la salle de conférence avec aplomb et sang-froid. Elle commençait à avoir le sentiment qu’il s’agissait maintenant de son enquête, peu importe que Porter souhaite qu’il en soit autrement.

Alors qu’elle se dirigeait vers la sortie, Nelson s’approcha d’elle et lui prit doucement le bras.

В« White, je peux te parler un instant ? В»

Il l’emmena de côté, la guidant vers la salle des photocopieuses avant qu’elle n’ait eu le temps de répondre. Il regarda autour de lui, d’un air conspirateur, s’assurant que personne ne pouvait les entendre. Quand il fut certain qu’ils étaient hors d’écoute, il la regarda d’une manière qui lui fit penser qu’elle avait fait quelque chose de mal.

« Écoute, » dit Nelson. « Porter est venu me voir hier soir et il m’a demandé pour être réassigné. Je lui ai catégoriquement refusé. Je lui ai également dit qu’il serait bête de laisser tomber cette affaire maintenant. Tu sais pourquoi il voulait être réassigné ? »

« Il pense que j’ai empiété sur ses plates-bandes hier soir, » dit Mackenzie. « Mais il était clair que les enfants refusaient de lui répondre et qu’il n’allait pas s’efforcer davantage pour communiquer avec eux. »

« Oh, pas besoin de m’en dire plus, » dit Nelson. « Je pense que tu as fait un sacré bon boulot avec ce jeune adolescent. Le garçon a même dit à d’autres types qui sont venus par la suite, y compris à ceux des services sociaux, qu’il t’avait vraiment appréciée. Je veux juste que tu saches que Porter est furieux aujourd’hui. S’il te crée des problèmes, viens me voir. Mais je ne pense pas qu’il le fera. Bien qu’il ne soit pas ton plus grand fan, il m’a tout de même avoué qu’il avait du respect pour toi. Mais ça, ça reste entre nous, OK ? »

В« Oui, monsieur, В» rГ©pondit Mackenzie, surprise par ce soutien et cet encouragement si soudain.

« Bon d’accord, » dit Nelson, en lui donnant une légère tape dans le dos. « Va attraper notre type maintenant. »

Mackenzie se précipita vers le parking où Porter l’attendait déjà, assis derrière le volant de leur voiture. Alors qu’elle se dépêchait pour rejoindre le véhicule, il lui jeta un regard lourd de mais qu’est-ce que tu foutais. Dès qu’elle fut dans la voiture, Porter démarra de la place de parking sans même attendre que Mackenzie ait fermé la portière.

« J’imagine que tu as reçu le rapport complet sur notre type ce matin ? » demanda Porter alors qu’il s’engageait sur l’autoroute. Deux autres voitures les suivaient, avec Nelson et quatre autres policiers en renfort si nécessaire.

В« Oui, В» rГ©pondit Mackenzie. В« Clive Taylor, quarante et un ans, dГ©linquant sexuel connu. Il a passГ© six mois en prison pour agression sur une femme en 2006. Il travaille dans une pharmacie du coin mais il effectue Г©galement des travaux de menuiserie dans un petit hangar situГ© sur sa propriГ©tГ©. В»

В« Ah, alors tu as dГ» rater le dernier mГ©mo envoyГ© par Nancy, В» dit Porter.

« Ah bon ? » dit-elle. « Qu’est-ce que j’ai raté ? »

« Le salaud a plusieurs poteaux en bois coupés derrière son hangar. Les infos montrent qu’ils ont exactement la même taille que ceux trouvés dans ce champ de maïs. »

Mackenzie fit dГ©filer ses emails sur son tГ©lГ©phone et vit que Nancy avait envoyГ© le mГ©mo il y avait Г  peine dix minutes.

« On dirait que c’est notre type, alors, » dit-elle.

« Tout à fait, » dit Porter. Il parlait comme un robot, comme s’il avait été programmé pour dire certaines choses. Il ne la regarda pas une seule fois. Il était clair qu’il était furieux mais ça ne dérangeait pas Mackenzie. Tant qu’il utilisait cette rage et cette détermination pour attraper le suspect, alors elle s’en moquait pas mal.

« Je vais te parler franchement, » dit Porter. « J’étais vraiment furieux quand tu as pris les rennes hier soir. Mais je dois avouer que tu as opéré une sorte de miracle avec ce gosse. Tu es plus intelligente que je ne veuille bien le reconnaître. Je l’admets. Mais le manque de respect… »

Il s’arrêta net, comme s’il ne savait pas vraiment comment terminer sa phrase. Mackenzie ne dit rien en retour. Elle regardait devant elle et essayait de digérer le fait qu’elle venait juste de recevoir ce qui pourrait presqu’être considéré comme des compliments de la part de deux personnes parmi les moins probables durant les quinze dernières minutes.

Elle eut soudain l’impression que ça pouvait être vraiment une très bonne journée. Peut-être qu’à la fin de cette journée, ils auraient arrêté l’homme responsable de la mort de Hailey Lizbrook et de nombreux autres meurtres non résolus durant les vingt dernières années. Si c’était ça la récompense, elle pouvait certainement parvenir à supporter l’humeur sombre de Porter.



*



Mackenzie regardait autour d’elle et se sentit déprimée en voyant les quartiers changer devant ses yeux, au fur et à mesure que Porter avançait dans les banlieues les plus défavorisées d’Omaha. Les belles subdivisions firent place aux immeubles d’appartements à loyer modéré, puis aux quartiers vraiment sordides.

Ils atteignirent assez vite le quartier de Clive Traylor, constitué de maisons pour faibles revenus, avec des pelouses inexistantes et des boîtes aux lettres tordues en bord de route. Les rangées de maisons semblaient ne jamais se terminer, chacune ayant l’air encore plus abandonnée que la précédente. Elle ne savait pas ce qui était le plus déprimant : leur état négligé ou leur monotonie.

Le quartier de Clive était calme et lorsqu’ils y arrivèrent, Mackenzie sentit une montée familière d’adrénaline. Elle se redressa involontairement, se préparant à affronter un meurtrier.

Selon l’équipe de surveillance qui avait l’oeil sur la propriété depuis trois heures du matin, Traylor était toujours à la maison. Il ne devait pas aller travailler avec treize heures.

Porter ralentit en s’avançant dans la rue et se gara juste en face de la maison de Traylor. Puis il regarda Mackenzie pour la première fois de la journée. Il avait l’air un peu à cran. Elle devait probablement l’être aussi. Cependant, en dépit de leurs différends, Mackenzie se sentait en sécurité au moment de se diriger avec lui vers une situation potentiellement dangereuse. Macho sexiste ou pas, c’était un pro chevronné qui savait ce qu’il faisait la plupart du temps.

В« Tu es prГЄte ? В» lui demanda Porter.

Elle hocha de la tête et sortit le micro de l’unité radio du tableau de bord.

В« Ici White, В» dit-elle dans le micro. В« On est prГЄt Г  intervenir dГЁs votre signal. В»




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